Comment devenir le Master Kwan de la rhétorique et de la dialectique ? Je suis convaincu qu’une étape primordiale pour atteindre cet objectif est de s’intéresser de près aux sophismes. Autrement appelés “moisissures argumentatives” ou “arguments fallacieux”, les sophismes sont tout un tas de techniques de communication afin d’avoir l’air d’être dans le vrai, de sembler avoir raison et de “gagner” un débat.
Bien entendu, à tête reposée, il peut être difficile de penser que quelqu’un pourrait gagner un débat en utilisant des moyens aussi malhonnêtes, mais n’avez vous jamais vécu un moment où vous saviez avoir raison mais n’avez pas su répondre à une tournure de phrase bien particulière ? Ou encore, lorsque vous étiez devant la télévision et que vous saviez, sans vraiment savoir pourquoi, qu’un Zemmour ou un Onfray ne disaient rien de très pertinent malgré l’assurance avec laquelle ils le disaient ?
A titre d’exemple, voici quelques phrases qui rentrent dans le thème abordé aujourd’hui :
“Si tu es si sûr de toi, tu n’as qu’à me prouver que les vaccins ne causent pas l’autisme !”
“Je pense que si tu dis ça, c’est parce que tu as du mal à te remettre en question.”
“Tous les avis se valent, après tout, qu’est-ce qui me fait dire que tu as plus raison que moi ?”
“Il y a principalement des noirs et des arabes en prison, cela devrait vous mettre la puce à l’oreille quant à la politique d’immigration !”
Comme l’explique Christophe Michel, nous pouvons avoir raison pour de mauvaises raisons, ainsi il n’est pas exclu qu’une personne utilise un sophisme ou un raisonnement biaisé afin d’appuyer une affirmation qui est factuellement vraie. Il est parfois nécessaire d’user de sophismes quand l’usage de la raison et des faits n’a pas suffi.
Pour autant, il est à mon sens indispensable lorsque l’on veut transmettre une information, des connaissances ou même une simple opinion, d’être le plus transparent possible et de ne pas chercher à manipuler dans notre intérêt la personne en face de nous. Il est aussi important de ne pas chercher à convaincre par-dessus tout si l’on ne veut pas user de sophisme, puisqu’à défaut d’avoir réussi à convaincre, nous allons chercher à persuader et donc tenter de toucher le cœur plutôt que l’esprit.
Les sophismes ont tendance à jouer sur nos biais cognitifs. C’est un peu comme en neurobiologie où certaines molécules ont des formes qui collent parfaitement à des récepteurs dans le cerveau. On a inventé plein de molécules, ou la nature s’en est chargé, qui ont une forme quasiment identique ou en tout cas suffisamment ressemblante pour se faire passer pour ces molécules endogènes et prendre leur place dans les récepteurs.
Par exemple, lorsqu’on fatigue, c’est surtout, grosso modo, du fait de l’adénosine. Quand on boit du café, on envoie de la caféine pour bloquer les récepteurs à adénosine et donc empêcher l’adénosine de venir s’installer tranquillement et nous fatiguer, on est donc pas fatigués. Les sophismes c’est un peu la même histoire. On entend quelque chose qui nous paraît logique mais qui ne l’est pas et l’illusion nous dépossède de certaines défenses au niveau de la rhétorique et de la dialectique, et nous sommes alors trompés et manipulés. De plus, beaucoup de gens font des sophismes sans s’en rendre compte, et l’illusion vaut pour eux qui pensent raisonner de manière logique mais en fait pas du tout.
Il existe d’innombrables sophismes dont la frontière entre chacun s’avère parfois floue, comme nous pouvons le voir dans L’art d’avoir toujours raison d’Arthur Schopenhauer. Celui-ci parle de la dialectique comme d’un art de l’escrime intellectuel, qu’il décortique en 38 stratagèmes différents dont le fameux stratagème ultime, l’attaque personnelle.
Cependant, je ne vais pas reprendre ici uniquement le livre de Schopenhauer afin d’établir une liste des différents sophismes. D’autres œuvres comme le Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens de Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois, La ferme des animaux de George Orwell, la Petite Philosophie des arguments fallacieux de Luc de Brabandère, Impostures intellectuelles d’Alan Sokal et Jean Bricmont, Logically Fallacious de Bo Bennet, Attacking Faulty Reasoning d’Edward Damer et enfin La démocratie des crédules de Gérald Bronner se sont montrés riches d’enseignements. De plus, je me sers de vidéos YouTube venant de chaînes comme Hygiène Mentale ou encore Defakator et la Tronche en Biais afin d’avoir le regard le plus large possible.
Je vous expose ici la liste avec les catégories et les sophismes qui les composent afin d’y voir clair en un coup d’oeil, n’hésitez pas à faire des ctrl + f et de copier/coller les éléments de la liste afin d’accéder directement à ceux qui vous intéressent.
C’est une stratégie rhétorique bien connue des plateaux télé et de la politique en général. Lorsque le message est trop solide pour être rapidement et clairement détruit, il est plus aisé d’attaquer le messager afin de salir son image. Les gens ont tendance à moins écouté quelqu’un qu’ils n’apprécient pas, même s’il a parfaitement raison.
C’est l’ultime stratagème proposé par Arthur Schopenhauer. Il consiste à ignorer sciemment l’argument proposé par notre interlocuteur en l’attaquant personnellement et pas sur ce qu’il déclare. Je peux décliner cela en trois points :
Ici, le sophiste attaque l’origine de la déclaration plutôt que son contenu. Ainsi, il devient possible de discréditer sans répondre en faisant mine de dévoiler une origine douteuse à la déclaration. Par exemple : “ce que tu dis viens de la vidéo du Raptor Dissident, je n’ai aucune envie d’écouter cet argument d’extrême droite”.
Dans l’exemple précédent, on peut voir que l’origine de la déclaration est surtout repoussante à cause de l’image d’extrême droite qui y est accolée. La logique veut que bien qu’un argument vienne d’une personnalité se revendiquant d’un parti politique qui ne nous plait pas ne veut pas dire que l’argument est mauvais ou faux pour autant. Par exemple : “Sanglier Sympa aussi est d’extrême droite, du coup, je n’ai rien à apprendre de lui”. C’est le stratagème 32 de Schopenhauer, principe de l’association dégradante.
On peut mettre le reductio ad Hitlerum dans cette catégorie, puisqu’il s’agit d’utiliser le Point Godwin qui est bel et bien un déshonneur par association. Exemple : “Voter Front National, c’est voter pour des nazis.”
Qui aura voulu aborder des sujets sensibles comme la religion aura peut-être été confronté à ce sophisme à plusieurs reprises. Il est impossible de prouver que quelque chose n’existe pas, comme les licornes, le bigfoot ou encore une quelconque divinité. Pour la simple et bonne raison que lorsqu’une chose n’existe pas, il nous est impossible d’avoir des preuves matérielles de son absence de la réalité. Cependant, lorsque quelque chose existe, il nous est possible d’avoir des éléments factuels afin d’affirmer son existence. Avec les appareils de mesure adéquats et une rigueur scientifique, nous pouvons donc par le biais d’un raisonnement étayé démontrer que quelque chose existe, du moins en partie. Ce sophisme prend forme par la phrase “tu dis que ça n’existe pas, mais tu n’as qu’à le prouver, moi je dis que ça existe”. C’est pourtant bel et bien à la personne qui affirme l’existence de quelque chose d’en apporter la preuve, tandis qu’il est plus raisonnable de ne pas croire en quelque chose si nous ne disposons d’aucun élément pouvant permettre cette affirmation.
C’est je pense l’un des sophismes les plus répandus dans les débats. En effet, il est très aisé de le pratiquer puisqu’il consiste à caricaturer les propos de la personne afin de démonter l’argument plus facilement. Le public croit généralement que la caricature est l’argument de départ énoncé alors qu’il n’en est rien, c’est une illusion très efficace et difficile à contrer en temps réel dans le feu de l’action. Par exemple : “A – Je pense qu’il faudrait limiter l’immigration puisqu’on a du mal à accueillir tout le monde dans des conditions convenables. B – Comment pouvez-vous dire qu’il faut laisser ces pauvres gens mourir chez eux ? C’est inhumain et contre les valeurs de la France !”
Comme le nom l’indique, il s’agit là de dire à l’interlocuteur qu’il utilise des sophismes sans que cela soit vrai. Cela permet de jeter le discrédit sur la personne puisque utiliser des sophismes dans un débat est plutôt mal perçu. Exemple : “Le Pr Raoult a dit qu’une deuxième vague d’épidémie était de la science-fiction et…” Couper la personne pour lui dire qu’elle fait un sophisme ne prouve en rien que cette personne utilise un argument d’autorité, puisqu’a priori on ne sait pas si il dit ça de manière factuelle (il a vraiment dit ça) ou s’il utilise ceci pour appuyer ses propres propos. La connaissance du contexte est donc très importante pour déterminer si un sophisme est proféré ou non.
Cela ressemble un peu au sophisme précédent, mais cela ne vise pas particulièrement à caricaturer les propos de l’autre, seulement de les élargir et généraliser afin de les rendre moins crédibles.
Il s’agit là d’étendre une proposition à quelque chose qui a peu ou rien à voir avec le discours d’origine, hormis sa similarité dans les termes employés. Cela permet d’entretenir une ambiguïté sur le sens des mots utilisés et de paraître réfuter un argument sans vraiment le faire.
On se contente ici de tout simplement récupérer ce que dit l’adversaire pour le retourner contre lui. Par exemple : “A- Il ne faut pas mélanger le scolaire et le sanitaire ! B – C’est justement à l’école qu’il faut apprendre les bases de l’hygiènes et enseigner des notions de santé publique.”
Ici, nous nous servons d’une mauvaise explication, en dépit du fait que l’adversaire ait malgré tout raison, afin de retourner la situation à notre avantage en exposant à ses yeux et ceux de l’auditoire qu’il a conclu quelque chose d’une mauvaise explication, ce qui vient discréditer l’ensemble de l’argumentation.
Attaquer la confiance en soi de la personne au lieu de l’argument ou de la preuve. Cela permet de remettre en question l’argument avancé puisque si la personne n’est pas sûre d’elle (ou bien qu’elle est trop humble pour affirmer l’être) alors on peut raisonnablement douter de ce qu’elle avance sans répondre au fond. Il ne faut pas hésiter à se faire confiance, on peut avoir raison. Ce qu’il faut éviter à tout prix est la certitude dogmatique dans les domaines où il n’y a pas de réelles certitudes.
J’enchaîne avec ce sophisme puisqu’il permet de faire le lien avec l’exemple précédent. En effet, l’individu A ne dit à aucun moment qu’il faut laisser des gens mourir, c’est une caricature de monsieur B. Mais il est possible que monsieur B ait réellement compris cela et fait donc un procès d’intention à monsieur A. Comme son nom l’indique, il s’agit là d’attaquer la personne sur ce qu’elle est suspectée de penser, une fois encore sans preuve.
Lorsque l’adversaire use d’un argument superficiel ou sophistique, et que nous voyons à travers, il est certes possible de le réfuter en exposant son caractère superficiel, mais il est préférable d’utiliser un contre argument tout aussi superficiel. Il n’est que peu efficace de dire à l’autre la nature de son argument et le public qui regarderait cette explication n’en tirerait aucune satisfaction, au contraire l’image qu’ils auraient de nous serait alors plus négative et nos futurs propos auraient moins de poids. C’est un peu l’image de la personne qui passe son temps à se justifier et tout expliquer, peu de gens sont réceptifs à ce genre de personnalité, même quand la personne a parfaitement raison.
Nous pouvons par la provocation inciter l’adversaire à aller au-delà des limites de son argumentation pour le réfuter et donner l’impression que nous avons réfuté l’argumentation elle-même. L’adversaire cherchera souvent lui-même à exagérer nos arguments au-delà de leurs limites et il faut l’arrêter immédiatement pour le ramener dans les limites établies. Exemple : “Voilà ce que j’ai dis, rien de plus, rien de moins.”
Il s’agit ici d’ironiser et de faire passer les propos de l’autre pour trop farfelus pour être compris. On insinue donc auprès de l’auditoire que les propos de l’adversaire sont idiots, mais attention à ce que l’auditoire soit de notre côté puisque c’est à double tranchant. Il faut maitriser l’ironie.
Lorsque l’argument avancé est mis à l’abri de la critique en fonction du niveau d’accomplissement de celui qui l’avance. Une forme de ce sophisme se produit également lorsque les arguments sont évalués en fonction des réalisations, ou du succès, de la personne qui les présente, plutôt que sur les mérites de l’argument lui-même.
Exemple : “Le jour où tu auras accomplis le dixième de ce que le Dr Raoult a accompli, tu pourras peut-être donner ton avis !” Cela ressemble beaucoup à l’argument d’autorité, mais ici la comparaison place ce sophisme dans l’attaque personnelle. De nombreuses personnes ayant réussi tentent d’utiliser leur succès comme un joker pour devenir une autorité en tout. Ne laissez pas le succès d’une personne obscurcir votre jugement sur les affirmations qu’elle fait. Évaluez les preuves avant tout.
Désorganiser le fil de pensée de l’interlocuteur peut être une stratégie efficace. En effet, à défaut d’avoir plus de connaissances et de répartie que lui, il peut venir à l’idée de rendre le débat flou et compliqué à suivre afin de rendre l’argumentaire adverse moins clair et donc moins difficile à détruire.
Pour faire le lien avec le sophisme précédent, voici un exemple : “57 médecins ont signé une tribune pour mettre en garde contre le vaccin !” On voit ici l’argument d’autorité anonyme avec un appel à la popularité. En effet, un médecin qui dit quelque chose est déjà une influence non-négligeable, mais 57 médecin, cela fait le même effet qu’une méta-analyse pour la plupart des gens, c’est une preuve incontestable qu’il y a un “truc” et les médecins disent “attention”.
Lorsque l’affirmation selon laquelle la plupart ou beaucoup de personnes en général ou d’un groupe particulier acceptent une croyance comme vraie est présentée comme une preuve de cette affirmation. Accepter la croyance d’une autre personne, ou les croyances de nombreuses personnes, sans exiger de preuves sur les raisons pour lesquelles cette personne accepte cette croyance, est une pensée paresseuse et une manière dangereuse d’accepter l’information.
Parfois, il y a de bonnes raisons de penser que la croyance commune est partagée par des personnes qui ont de bonnes preuves pour y croire. Par exemple, si la quasi-totalité des scientifiques terrestres acceptent que l’univers a environ 13,7 milliards d’années, il est sage de les croire car ils seront en mesure de présenter des preuves objectives et empiriques des raisons de leur croyance.
Au lieu de preuves, vous essayez d’établir un lien avec le public en vous basant sur le fait que vous êtes une “personne ordinaire” comme chacun d’entre eux. Puis de suggérer que votre proposition est quelque chose que tous les gens ordinaires croient ou devraient accepter.
Un degré en-dessous de l’argument d’autorité avec l’appel à la majorité, on peut placer l’appel à la pratique courante qui veut qu’une chose soit vraie parce qu’elle serait courante. Hors elle peut être ni vraie, ni fausse, ni courante, etc. Exemple : “Cet homme politique n’est pas plus corrompu que les autres, ils sont tous corrompus.” Cet argument n’apporte rien au débat et ne permet pas de déceler la vérité.
Affirmer que votre conclusion ou vos faits sont simplement du “bon sens” alors qu’en fait, ils ne le sont pas. S’il y a le moindre doute sur le fait que la croyance n’est pas commune, nous devons argumenter sur les raisons pour lesquelles nous pensons que quelque chose relève du bon sens, plutôt que de simplement affirmer qu’elle l’est. Il s’agit d’une version plus spécifique de la prétendue certitude.
L’argumentum ad ignorantiam consiste à affirmer une vérité puisqu’on ne dispose pas de la preuve du contraire. Cela s’appuie parfois sur l’inversion de la charge de la preuve, si l’adversaire ne peut prouver l’inexistence de quelque chose. Exemple : “On a pas de preuve que Dieu n’existe pas, je continuerai donc à affirmer qu’il existe.” Les conditions mêmes de notre démocratie contemporaine favorisent la diffusion de ce sophisme dans l’espace public. C’est la possibilité, pour celui qui réclame le droit au doute, d’ensevelir tout discours concurrent au sien sous un tombereau d’arguments.
Conclure que parce que vous ne comprenez pas quelque chose, cela ne doit pas être vrai, c’est improbable, ou l’argument doit être défectueux. Il s’agit d’une forme spécifique de l’argument de l’ignorance.
Il incombe à l’auteur de l’argument de le rendre aussi clair que possible et d’utiliser un langage et des termes que le public peut comprendre. C’est un problème majeur dans la communication scientifique. La malédiction de la connaissance conduit souvent ceux qui tentent d’expliquer un sujet complexe à supposer que le public a autant de connaissances qu’eux dans ces domaines. Si votre public ne comprend pas votre argument, ne le blâmez pas ; expliquez votre argument différemment.
Avec ce sophisme, on admet les prémisses tout en niant la conséquence en faisant fi des preuves. On jette donc le doute sur la théorie, puisque ce qui est correct en théorie devrait fonctionner, dans les grandes lignes, en pratique, et si ça ne fonctionne pas c’est qu’il se trouve une erreur dans la théorie.
Il s’agit là d’affirmer que puisqu’une déclaration est “incroyable” (en tout cas aux yeux de celui qui refuse d’y croire), cela ne peut être vrai. Par exemple : “Que des humains aient pu bâtir des pyramides de cette taille est une théorie trop folle pour que j’y croie.”
On se sert ici de la fortune d’une personne ou du prix d’un objet pour en retirer une certaine qualité. Par exemple : “Cette voiture est la plus chère du marché, elle doit être la meilleure.” ou encore “Jeff Bezos est l’homme le plus riche du monde, lorsqu’il dit quelque chose ce doit être très intelligent.”
On fait l’inverse du sophisme précédent, nous partons du principe qu’une affirmation est vraie puisque portée par quelqu’un de pauvre. Il y aurait une certaine vertu à être pauvre et donc une capacité particulière à dire des choses vraies. Exemple : “Ce moine a fait vœu de pauvreté, donc lorsqu’il parle de charité il en sait forcément beaucoup plus que toi.”
Ce sophisme consiste à faire diversion afin d’éviter de répondre à quelque chose. Il est possible d’utiliser d’autres sophismes comme des attaques personnelles afin d’obtenir une diversion suffisamment efficace. “A – Pensez-vous que votre programme politique soit solide sur la question écologique ? B – Pensez-vous que celui des autres soit mieux ?” On voit là une tentative désespérée de mettre l’attention sur d’autres programmes que le sien. C’est le stratagème 29 de Schopenhauer et aussi ce qu’on pourrait appeler du whataboutisme.
C’est un sophisme où l’on emploie une excuse typiquement discrète ou non-offensive pour éviter d’évoquer une vraie raison qui pourrait amener des risques réels ou imaginés. Par exemple : “Je suis désolé mais je crois qu’on devrait rester amis.” Ici, il est courant que la personne ne veuille ni sortir avec nous, ni spécialement être notre ami.
On cherche la confusion chez l’adversaire en tenant des propos surréalistes et sans aucun sens. Cela peut s’apparenter au mille-feuilles argumentatif puisqu’en apparence cela peut paraître cohérent et crédible, mais cela ne le sera pas.
Si nous nous rendons compte que l’adversaire a entrepris une série d’arguments qui va mener à notre défaite, il ne faut pas lui permettre d’arriver à conclure mais l’interrompre au milieu de son argumentation, le distraire et dévier le sujet pour revenir sur un terrain plus confortable pour nous. On se sert surtout du stratagème du chiffon rouge pour en arriver là.
Si l’adversaire nous repousse en présentant des preuves contraires, il est souvent possible de se sauver en établissant une fine distinction à laquelle nous n’avions pas pensé auparavant.
Répéter un mensonge un nombre suffisant de fois pour le rendre un peu plus vrai dans l’esprit de la personne qui l’entend. C’est une technique classique de communication des médias et des politiciens. Par exemple : “Ce que veulent les jeunes de 18 ans, c’est travailler !” Ce genre de phrase est largement répété afin de justifier des politiques publiques et de gagner l’assentiment de l’électorat bien qu’aucune preuve ne soit fournie de l’envie de travailler des jeunes de 18 ans.
Croire que si quelque chose peut arriver, alors cela arrivera. On peut retrouver ce sophisme dans nombre de pentes savonneuses. Par exemple : “A – Il y a 99% de chances de perdre le pari. B – Alors il y a tout de même 1% d’espoir !”
Partir du principe qu’une personne n’a jamais “vraiment été comme ceci ou comme cela”. Par exemple : “A – Jean ne croit plus à tout ce que l’anthroposophie lui a appris. B – Oui, enfin, il n’a jamais vraiment été un adepte.” L’intérêt de ce sophisme est surtout de discréditer un argument du type “X a changé d’avis sur cette question, tu pourrais peut-être y réfléchir aussi.” Bien qu’il ne soit pas un argument logique infaillible que de dire “si il a changé d’avis, tu devrais aussi”, répondre par le sophisme du vrai écossais ne l’est pas plus.
Qui ne s’est jamais entendu dire qu’il n’avait pas son mot à dire sur l’écologie puisqu’il possède une voiture ? C’est un sophisme et posséder une voiture n’empêche en rien de proposer des solutions et d’être critique quant à tout un tas de comportements qui ne sont pas écologiques.
Ce sophisme est souvent utilisé lorsqu’on analyse un comportement humain ou social. Ilconsiste à accuser une personne ou un groupe qui a un intérêt en faveur de ce qui arrive.
Empiler un foisonnement d’arguments faibles dans un maillage si serré qu’ils se renforcent réciproquement sans qu’on puisse les confronter entre eux. Généralement, ce sophisme est pratiqué de sorte à nous faire perdre le fil et associer tout un tas d’arguments bancals qui rendent le tout a priori cohérent et crédible, sans trop nous laisser le temps de répondre. Le “documentaire” Hold Up en est un exemple intéressant, rassemblant nombre de figures de la “complosphère“.
L’usage de métaphores et d’analogies est en principe utile afin de simplifier un concept pour transmettre une information ou un concept. Seulement, beaucoup de personnes choisissent des métaphores et des analogies permettant de tordre les concepts pour aller dans le sens de leur propos. Exemple : “La vie c’est pas un kiwi, tu peux pas faire ça.” Il n’y a pas de lien logique entre le fait que le monde ne soit pas un kiwi et le fait de ne pas pouvoir faire quelque chose. C’est le stratagème 12 de Schopenhauer, choisir des métaphores favorables.
Cela consiste à tromper l’interlocuteur en lui posant une question qui présuppose une proposition qui n’a été ni prouvée ni acceptée par la personne qui doit répondre. C’est donc une question fermée qui au-delà d’attendre une réponse attend un état de la part de la personne (on la manipule pour qu’elle bafouille, se justifie, etc). Par exemple : “Depuis quand êtes vous alcoolique ?” Une variante de ce sophisme est la question piège, qui consiste mettre exprès une assertion que l’on sait discutable ou fausse dans la question. On cherche alors une réponse binaire, oui ou non, alors que la réponse mériterait une élaboration plus complexe et précise que ça pour écarter tout soupçon.
Accepter des preuves sur la base d’un désir de clôture – ou d’en finir avec la question. Bien que le désir de clôture soit un phénomène psychologique réel qui a un effet sur le bien-être des individus, utiliser la “clôture” comme raison pour accepter des preuves qui, autrement, ne seraient pas acceptées, est fallacieux. C’est similaire à l’argument de l’ignorance, qui consiste à faire une affirmation basée sur le manque d’information parce que le fait de ne pas savoir est trop inconfortable psychologiquement. Cependant, l’appel à la fermeture se concentre sur l’acceptation de la preuve et pour la raison de la fermeture.
C’est sûrement la stratégie la plus risquée, puisqu’elle implique de jouer sur les mots, de mentir et donc de déformer sciemment la réalité à son avantage. Se faire attraper à pratiquer cette stratégie peut donc être lourd de conséquence, notamment sur le plan juridique.
Lorsque le sens d’un mot, d’une phrase ou d’une idée entière est interprété différemment en changeant l’endroit où tombe l’accent.
Exemple : Dans le film Mon cousin Vinny , le personnage de Ralph Maccio, Bill, est interrogé pour un meurtre présumé. Lorsque le policier lui demande : “A quel moment avez-vous tiré sur le vendeur ?” Bill répond, choqué, “J’ai tiré sur le vendeur ? J’ai tiré sur le vendeur ?” Plus tard dans le film, le policier lit la déclaration de Bill comme une confession au tribunal, ” …et il a dit, ‘J’ai tiré sur le vendeur. J’ai tiré sur le vendeur.”
Nos préjugés peuvent nous faire manquer la nuance vocale. Écoutez activement et de manière critique, et essayez de ne pas tirer de conclusions hâtives.
Également appelé : erreur d’accentuation, erreur de prosodie, accent trompeur.
Je pense qu’il est important de commencer par celui-ci tant il est répandu. Pour autant, il est parfois intuitif de se dire que la personne ment alors qu’il arrive aussi et surtout que la personne se mente à elle-même, disant donc paradoxalement la vérité. En effet, une personne peut affirmer quelque chose de parfaitement faux sans le savoir, ce qui n’en fait alors pas un mensonge mais une erreur (bien que la personne cherchera souvent à user de sophismes afin de supporter son affirmation). Partir du principe qu’une personne ment implique donc très souvent un procès d’intention puisqu’on ne peut savoir avec certitude qu’elle ment. Un principe que j’apprécie veut que l’on parte en premier lieu sur l’idée qu’une personne fait ce qu’elle fait pour de bonnes raisons et avec de bonnes intentions, nous laissant le loisir de modifier notre avis avec le temps. Je ne pense pas avoir besoin de donner un exemple pour ce sophisme.
Le lien avec le mensonge est étroit, mais malgré tout plus “construit”. En effet, un mensonge pur et simple peut-être n’importe quoi, alors qu’il s’agit ici de malgré tout fournir un argument, qui a notre connaissance s’avère faux mais pas aux yeux de l’adversaire qui n’a pas encore pu vérifier ou chercher la véracité de l’argument. Dans le feu du débat, le faux argument peut donc passer aisément là où un mensonge serait potentiellement plus facilement détectable.
Ici, nous concluons tout simplement comme si l’adversaire avait apporté les éléments nécessaires à notre conclusion, nous donnant en apparence raison. C’est risqué puisque l’adversaire peut s’en rendre compte et nous rappeler à l’ordre, mais si nous disposons d’assez de charisme et d’éloquence, il se peut que tout le monde n’y voit que du feu.
Lorsque nous avons postulé nos prémisses et que l’adversaire les a admises, il faut s’abstenir de lui demander de tirer lui-même une conclusion et le faire soi-même immédiatement.
Il s’agit là de prendre une proposition de l’adversaire et d’en déformer l’esprit pour en tirer de fausses propositions, absurdes et dangereuses que sa proposition initiale n’incluait pas. Cela donne l’impression que sa proposition a donné naissance à d’autres qui sont incompatibles entre elles ou défient une vérité acceptée. C’est très proche du sophisme de l’homme de paille.
Comme le nom l’indique, il s’agit là d’”omettre” de partager une info qui pourrait affaiblir notre argumentaire, en connaissance de cause. Cela s’apparente au mensonge, mais vu qu’on ne dit pas le contraire de ce que l’on pense, on ne dit rien sur un point précis, c’est donc différent du mensonge bien que l’intention ne soit pas plus louable. Nous pouvons rapprocher ce sophisme au stratagème 4 de Schopenhauer, cacher son jeu.
Il s’agit d’un sophisme en logique formelle. Les sophismes formels peuvent être déroutants et complexes et ne sont pas aussi courants dans les situations de tous les jours, alors ne vous sentez pas perdu en lisant les sophismes formels – faites de votre mieux pour les comprendre.
Syllogisme : un argument composé généralement de trois parties : une prémisse majeure, une prémisse mineure et une conclusion.
Terme catégorique : habituellement exprimé grammaticalement comme un nom ou une expression nominale, chaque terme catégorique désigne une classe de choses.
Proposition catégorique : joint exactement deux termes catégoriques et affirme qu’une relation existe entre les classes qu’ils désignent.
Syllogisme catégorique : un argument composé d’exactement trois propositions catégoriques : une prémisse majeure, une prémisse mineure et une conclusion, dans lequel apparaît un total d’exactement trois termes catégoriques, chacun d’entre eux étant utilisé exactement deux fois.
La conclusion d’un syllogisme catégorique de forme standard est affirmative, mais au moins une des prémisses est négative. Toute forme valide de syllogisme catégorique qui affirme une prémisse négative doit avoir une conclusion négative. Les syllogismes et l’identification des sophismes formels (au moins par la forme) sont courants dans les tests d’intelligence. Sachez-le et soyez plus intelligent (au moins sur le papier).
Nous cherchons là à cacher notre intention dans le débat. Cela consiste à faire admettre nos prémisses au fur et à mesure du déroulé de notre argumentation, afin d’empêcher l’adversaire de présenter le moindre désaccord puisqu’il a admis volontiers tout ce qui précède notre conclusion. Ce stratagème me paraît étroitement lié au stratagème 7, atteindre le consensus par des questions, où l’on cherche l’assentiment de l’autre en posant des questions auxquelles il lui serait difficile de répondre par la négative.
Ici, nous allons poser des questions dans un ordre différent de celui duquel la conclusion dépend. Cela reste dans l’esprit de cacher son jeu tout en questionnant et suscitant des réponses qui nous sont favorables pour poser une conclusion difficile à rejeter.
Ici, nous allons détailler à l’extrême quelque chose afin de rendre sa déclaration bien plus crédible et convainquant. On peut s’en servir sans trop de soucis dans le mille-feuilles argumentatif. On cherche là à convaincre quelqu’un que quelque chose est un problème en cherchant à le rendre plus problématique que ce qu’il en est vraiment en usant d’une multitude de détails. Par exemple : “Après avoir légalisé le cannabis au Portugal, beaucoup de gens se sont mis à fumer, ce qui a augmenté la prévalence de la consommation et donc les risques de santé publique. D’ailleurs, on sait bien que cette consommation a des effets néfastes sur le cerveau et les poumons à cause de la combustion, encore plus chez les adolescents qui fument pour appartenir à un groupe social, ce qui met une pression importante sur les jeunes. Etc…”
Le sophisme précédent peut facilement basculer dans celui-ci, puisqu’il s’agit là de détailler mais cette fois sur les possibles conséquences de quelque chose. Par exemple : “Si nous légalisons le cannabis en France, nous enverrons un message aux jeunes en leur disant qu’ils peuvent maintenant faire ce qu’ils veulent. D’ici peu, on proposera de légaliser l’inceste et, pourquoi pas, la pédophilie.” (J’ai pas inventé l’exemple, je vous laisse chercher quel grand “philosophe” médiatique qui écrit beaucoup de livre a pu dire ça avec le plus grand sérieux). Comme l’écrivait Cicéron dans De la divination, Livre II, chapitre XXIX : “Les haruspices ne sont pas malchanceux au point que jamais n’arrive par hasard l’événement qu’ils ont annoncé.” Méfiance, donc, lorsqu’une prédiction incroyable survient, puisque l’on commence à voir que nombre de personnes médiatiques ont souvent tort dans leurs prédictions ou bien ont raison pour de mauvaises raisons.
Différent du mensonge parce que cela peut être une déclaration vraie, elle est pour autant invérifiable et ne peut donc constituer une preuve acceptable. Cela peut être une anecdotes personnelle. Par exemple : “Moi je sais que Manuel Valls est sincère lorsqu’il parle, ça se voit !” On peut rapprocher ce sophisme du stratagème 6 de Schopenhauer, postuler ce qui n’a pas été prouvé.
L’argument du silence est un raisonnement qui s’appuie sur le fait que quelque chose n’ait pas été mentionné, comme si ce qui n’est pas évoqué par quelqu’un ou dans un livre n’existe nécessairement pas. Par exemple : “Il n’aime pas cette fille, il ne lui a jamais dit ni à elle ni à nous.” On ne sait tout simplement pas s’il l’aime et le fait de le dire ou pas ne prouve rien.
Nous essayons là de sauver une certitude, une déclaration, à grand renfort de modifications au fil de la conversation, à tel point que ce que l’on affirmait au début peut être complètement différent de ce que l’on finit par affirmer. Très souvent, nous voulons désespérément avoir raison et nous accrocher à certaines croyances, malgré toute preuve du contraire. En conséquence, nous commençons à inventer des excuses pour expliquer pourquoi notre croyance pourrait être vraie, et l’est toujours, malgré le fait que nous n’avons aucune preuve réelle de ce que nous inventons.
Exemple : “A – Je suis sûr que cette voiture est bien meilleure ! B – Je ne suis pas si sûr, elle consomme beaucoup d’essence sur l’autoroute par rapport aux autres de la même gamme. A – Oui enfin, je dis surtout ça parce qu’elle a une bonne tenue de route. B – Pas plus que bien d’autres. A – Je pense surtout au confort au volant, c’est en cela qu’elle est vraiment meilleure !” Bref, A ne veut pas lâcher son affirmation de départ mais la modifie pour arriver au moment où il aura peut-être raison, en tout cas en apparence.
Lorsque vous soupçonnez les gens d’inventer des choses, plutôt que de fournir des preuves à l’appui de leurs affirmations, demandez-leur simplement : “Quelles sont les preuves que vous avez à l’appui de cette affirmation ?”
Ici, nous mettons de côté les éléments importants et nous soutenons la solidité d’une affirmation sans autre preuve que la conclusion de notre déclaration. Par exemple : “Toutes les drogues dangereuses sont illégales, c’est pour ça qu’elles sont illégales.” Si notre adversaire veut que nous admettions quelque chose à partir duquel le point problématique du débat s’ensuit, il faut refuser en déclarant que l’adversaire fait une pétition de principe. L’auditoire identifiera immédiatement tout argument similaire comme tel et privera l’adversaire de son meilleur argument.
Là, on généralise d’après une échantillon qui n’est pas représentatif afin d’appuyer nos arguments. Exemple : “D’après un sondage IFOP de 1000 personnes, les musulmans en France sont en majorité radicalisés.” Avec plus de deux millions de musulmans en France, il serait surprenant que seulement 1000 d’entre eux soient un échantillon parfaitement représentatif de l’ensemble dont on parle. On peut aussi mettre en parallèle ce sophisme avec l’argument de faillibilité, notamment dans le cadre de la confiance des gens en la science. En effet, puisque la méthode scientifique n’est pas efficace à 100% et peut parfois mener à des erreurs, alors la moindre erreur peut devenir un exemple pour les personnes n’ayant aucune envie d’accorder du crédit à une étude scientifique ou une méta-analyse. Cela s’apparente au stratagème 11 de Schopenhauer, généraliser ce qui porte sur des cas précis.
Si l’adversaire nous défie expressément de mettre à mal un point particulier de son argumentation mais que nous ne voyons pas grand-chose à y redire, nous tentons alors de généraliser le sujet puis de l’attaquer sur cette généralité (qui s’éloigne donc du propos de départ). Si on nous demande d’expliquer pourquoi on ne peut pas faire confiance à une certaine hypothèse physique, nous pouvons invoquer la faillibilité de la connaissance humaine (argument de la faillibité).
Le fameux biais de confirmation. Chez la plupart des gens il passe inaperçu et fait des ravages intellectuels. Mais certains sont assez doués pour s’en servir et vous faire entendre ce que vous voulez entendre, vous amenant à accepter les propos entendus puisqu’ils vont, en apparence, dans le sens de vos idées. Difficile ici de donner un exemple, puisqu’il s’agit simplement d’être d’accord avec un propos avec lequel vous êtes d’accord par principe. Ainsi, si vous êtes contre les médicaments, quelqu’un qui viendra affirmer devant vous que la ritaline n’est pas bonne pour les enfants atteints de TDAH, vous serez d’accord sans la moindre réflexion sur la question. Le lien avec le stratagème 25 de Schopenhauer, trouver une exception, est étroit puisque l’exception sera trouvée facilement pour quiconque ne souhaite simplement pas entendre certaines affirmations. La moindre exception permettra de réfuter tout et n’importe quoi.
Faire l’hypothèse erronée que, lorsqu’on lui présente une possibilité de type “ou”, si l’une des options est vraie, l’autre doit être fausse. C’est le cas lorsque le “ou” n’est pas explicitement défini comme étant exclusif.
Exemple : j’aime beaucoup boire de la bière ou bien je manque de volonté. On peut très bien aimer boire de la bière et manquer de volonté, en même temps.
Nous y sommes confrontés au quotidien lorsque l’on regarde la télévision. Il s’agit là d’imposer seulement deux possibilités à une question. Exemple : “Si on ne régule pas mieux l’immigration en France, soit c’est la guerre civile soit c’est le grand remplacement.” Il y a un magnifique exemple de faux dilemme dans La Ferme des animaux d’Orwell page 42. “Savez-vous ce qu’il adviendrait si nous, les cochons, devions faillir à notre devoir ? Jones reviendrait ! Oui, Jones ! Assurément, camarades — s’exclama Brille-Babil, sur un ton presque suppliant, et il se balançait de côté et d’autre, fouettant l’air de sa queue –, assurément il n’y en a pas un seul parmi vous qui désire le retour de Jones ?” Brille-Babil est malin, il dit aux autres animaux que s’ils ne veulent pas laisser le lait et les pommes aux cochons, alors inévitablement les cochons ne pourront plus assurer leurs fonctions et Jones reviendrait alors. Ce faux dilemme s’inscrit donc dans une pente savonneuse, puisqu’on ne laisse que deux possibilités aux animaux, et on grossit les conséquences s’ils font le mauvais choix qui leur est fortement suggéré.
Aussi “situation perdant-perdant”, c’est lorsqu’on vous présente seulement deux choix, qui sont essentiellement les mêmes, mais formulés différemment. Cette technique est souvent utilisée dans la vente. Le raisonnement fallacieux serait commis par la personne qui accepte les options comme étant les seules options, ce qui serait très probablement à un niveau subconscient puisque pratiquement n’importe qui – s’il y réfléchit – reconnaîtrait l’existence d’autres options.
Exemple : “Si tu n’es pas une sorcière, tu n’as rien à craindre. Si tu n’es pas une sorcière, tu n’es pas en bois ; par conséquent, tu vas couler et te noyer après que nous t’aurons attachée et jetée dans le puits. Si tu flottes, alors tu es en bois, tu es une sorcière, et nous te pendrons.”
Chaque fois que l’on vous présente des options, envisagez soigneusement la possibilité d’autres options non mentionnées, et proposez-les.
Pour que notre adversaire accepte une proposition, il faut également lui fournir la contre-proposition et lui donner le choix entre les deux, en accentuant tellement le contraste que, pour éviter une position paradoxale, il se ralliera à notre proposition qui est celle qui paraît le plus probable. Par exemple : “Est-ce qu’un enfant doit désobéir ou bien obéir à ses parents ?” Cela prend l’apparence d’un faux dilemme, d’où sa place dans la liste. C’est comme placé du gris à côté du noir et appeler ça du blanc, ou bien le placer à côté du blanc et appeler ça du noir.
Faire croire qu’une probabilité est bien plus élevée qu’elle ne l’est vraiment, s’appuyant sur le biais cognitif de l’oubli de la fréquence de base. “Une maladie, qui touche 1 personne sur 1 000, peut être détectée par un test. Celui-ci a un taux d’erreurs positives de 5%, c’est-à-dire qu’il y a 5% de faux positifs. Un individu est soumis au test. Le résultat est positif. Quelle est la probabilité pour qu’il soit effectivement atteint ?” La réponse intuitive de beaucoup de gens, sur laquelle le sophiste cherche à surfer, est bien plus élevée que la vraie réponse.
La majorité des gens donnent 95% alors que la vraie réponse est d’environ 2%.
Il arrive que d’”éminents” auteurs, notamment en sciences sociales mais pas que (et le mot auteur est choisi pour ne pas dire chercheur ou scientifique, puisque c’est souvent des gens qui ne publient aucune recherche qui s’en montrent le plus coupable) abusent d’un vocabulaire en apparence très intelligent et précis, mais qui en vérité ne veut absolument rien dire. Beaucoup de post-modernistes sont friands de cette façon de nous instruire, nous pauvres ignorants. Il est parfois difficile de déceler le vrai du faux, n’étant nous-mêmes pas forcément des experts en mathématiques ou dans d’autres disciplines utilisant les chiffres, par exemple.
Tout d’abord, du côté de Jacques Lacan : “C’est ainsi que l’organe érectile vient à symboliser la place de la jouissance, non pas en tant que lui-même, ni même en tant qu’image, mais en tant que partie manquante à l’image désirée : c’est pourquoi il est égalable au √-1 de la signification plus haut produite, de la jouissance qu’il restitue par le coefficient de son énoncé à la fonction de manque de signifiant : (-1).”
Je ne peux pas résister à en mettre un deuxième, cette fois de Julia Kristeva : “[D]ans les opérations syntaxiques succédant au stade du miroir, le sujet est déjà assuré de son unicité : sa fuite vers le “point ∞” dans la signifiance est stopée. On pense par exemple à un ensemble C0 sur un espace usuel R3 où pour toute fonction F continue dans R3 et tout entier n>0, l’ensemble des points X où F(X) dépasse n, soit borné, les fonctions de C0 tendant vers 0 quand la variable X recule vers l’”autre scène”. Dans ce topos, le sujet placé dans C0 n’atteint pas ce “centre extérieur du langage” dont parle Lacan et où il se perd comme sujet, situation qui traduirait le groupe relationnel que la topologie désigne comme anneau.”
Ces deux exemples ne veulent strictement rien dire, et ne pas les comprendre ne veut pas dire que vous n’êtes que des idiots.
Nous pouvons rajouter celui-ci au sophisme précédent. C’est l’utilisation délibérée et excessive d’acronymes et d’abréviations pour paraître plus compétent dans le domaine ou pour confondre les autres. Pour autant, ne soyez pas si prompt à supposer des intentions néfastes. Parfois, les gens ne sont tout simplement pas conscients qu’ils abusent de ce type de langage.
Utiliser la définition limitée d’un terme donnée par un dictionnaire comme preuve que ce terme ne peut avoir un autre sens, un sens élargi ou même un sens contradictoire. Il s’agit d’un sophisme car les dictionnaires ne raisonnent pas ; ils sont simplement le reflet d’une version abrégée de l’usage courant d’un terme, tel que déterminé par l’argumentation et l’acceptation finale. En bref, les dictionnaires vous disent ce qu’un mot signifiait, selon les auteurs, au moment de sa rédaction, et non ce qu’il signifiait avant cette période, après, ou ce qu’il devrait signifier.
Les dictionnaires sont généralement concis et n’ont pas la profondeur que l’on trouve dans une encyclopédie ; par conséquent, les termes trouvés dans les dictionnaires sont souvent incomplets lorsqu’il s’agit d’aider les gens à acquérir une compréhension complète du terme.
L’amphibologie est en logique une construction grammaticale qui permet à une phrase d’avoir deux sens différents et qui peut conduire à un raisonnement fallacieux. Il n’est pas nécessairement utilisé pour tromper, mais généralement les personnes qui l’utilisent tiennent beaucoup à leurs propos et ont du mal à admettre l’ambiguïté de ceux-ci. Par exemple : “Moi je dis que l’humanité va droit dans le mur.” Ici, on peut comprendre un peu ce qui nous convient. Est-ce que l’humanité va connaitre une extinction ? Est-ce qu’on va seulement vivre un moment très difficile ? Est-ce qu’on va dans le mur “moralement”, au sens où l’on ferait des choses immorales et ce serait donc une conséquence “psychologique” ? Bref, il faut éclaircir et ce n’est pas une mince affaire quand la personne considère que ce qu’elle dit tombe sous le sens.
N’ayez pas peur de demander des éclaircissements, surtout si l’alternative est de supposer que votre interlocuteur est déraisonnable ou trompeur.
Le but ici est de jouer avec la complexité de la logique de manière générale. Le but est de convaincre en faisant croire que “c’est mathématique !” alors que ça ne l’est clairement pas. C’est aussi une stratégie pouvant permettre de faire croire à l’interlocuteur qu’au final, il pourrait bien être d’accord avec vous, faute de réussir à raisonner autrement.
“Qui ne suit pas les prémisses.” C’est la base de beaucoup de sophismes, en soit. Si A implique B, on peut penser intuitivement que l’un ne va pas sans l’autre. Cependant, Il peut y avoir l’un sans l’autre. Par exemple : “Si je fume un joint, alors j’aurai une crise psychotique. J’ai une crise psychotique, alors j’ai fumé un joint.” En réalité, on peut avoir une crise psychotique pour de tout autres raisons.
Il n’est pas rare de discuter avec des gens qui basent leur réalité sur tout une série d’anecdotes. Ils chercheront souvent à vous convaincre de la même manière qu’ils ont été convaincus : par des anecdotes. Exemple : “Je connais quelqu’un qui connait quelqu’un (répéter à l’infini) qui a soigné sa tumeur grâce à une psychothérapie qui consistait à parler de son enfance !”
C’est le sophisme qui se base sur le principe de la faillibilité de la science, en ceci que “Galilée en son temps fut ridiculisé, alors qu’il avait raison !”. Ce sophisme permet à ceux qui croient en des pseudo-sciences et autres croyances sans preuve qu’un jour viendra où ils auront enfin une certaine reconnaissance scientifique (tout en la critiquant sèchement et en la rejetant quand elle ne va pas dans leur sens). Ainsi, cela permet d’affirmer n’importe quoi à l’aspect quelque peu scientifique sous prétexte que toute bonne science n’a pas été reconnue comme telle dès le début, sans prendre en compte le contexte de l’avancée des connaissances (la religion dans le cas de Galilée).
Dans un pari, on a tendance à croire que les précédents ont une influence sur les prochains. Il n’en est rien puisque les probabilités ne changent pas d’un jet de dé à l’autre, même si l’on peut faire des probabilités sur des suites de jets. Ainsi, il est possible que certains essaient de vous convaincre que si vous avez fait un bon jet de dé, vous êtes en veine et il faut continuer à jouer !
On se sert avec cet argument de l’aspect esthétique afin d’appuyer une affirmation. Ainsi, si une voiture est stylée, elle est forcément de bonne facture. Si une femme est jugée belle, alors c’est qu’elle dispose de certaines vertus, etc.
Ce sophisme consiste à prétendre que les caractéristiques ou les convictions d’une partie d’un groupe s’appliquent à la totalité du groupe. Exemple : “Les terroristes aujourd’hui sont des islamistes radicaux, tous les musulmans sont donc susceptibles de devenir terroristes.”
Celui-ci implique l’inverse du précédent. Ce sont les caractéristiques du groupe que l’on va appliquer à une partie des individus composant le groupe. Exemple : “La religion catholique est contre l’homosexualité. Lui, il est catholique donc forcément contre l’homosexualité.”
Il s’agit ici de faire croire que si deux choses ont une même propriété, cela voudrait dire qu’elles sont identiques.
Appliquer trop largement une règle globale. Par exemple : “Cette jeune fille est en perdition et, comme pour toutes les jeunes filles en perdition, c’est à cause d’un manque d’autorité paternelle.”
Conclure trop rapidement quelque chose d’une simple observation ou d’un échantillon qui n’est pas représentatif du groupe dont on parle. Exemple : “J’ai vu un junkie fumer du crack dehors, il était dans un sale état. Les consommateurs de drogues sont tous sûrement tous dans cet état-là.” Lorsqu’on tente d’appliquer une règle générale à toutes les situations alors qu’il existe manifestement des exceptions à la règle. Les règles ou les lois simplistes prennent rarement en considération les exceptions légitimes, et ignorer ces exceptions revient à court-circuiter la raison pour préserver l’illusion d’une loi parfaite. Les gens aiment la simplicité et préfèrent souvent la conserver au détriment de la rationalité.
Également connu sous le nom de : destruction de l’exception, dicto secundum quid ad dictum simpliciter, dicto simpliciter, accident converse, accident inverse, sophisme de la règle générale, sophisme de l’accident.
Très proche du sophisme précédent, elle cible l’individu et pas le groupe. Exemple : “Il est pour la légalisation du cannabis ? C’est sûrement un drogué.”
Affirmer une conclusion sans preuve ni prémisses, par le biais d’une déclaration qui fait apparaître la conclusion comme certaine alors qu’en fait, elle ne l’est pas. Bien sûr il existe beaucoup d’affirmations que l’on peut faire sans avoir besoin de preuve particulière, comme le fait d’avoir besoin d’air pour respirer, que l’eau mouille et que le feu brûle.
Il s’agit là de faire croire quelque chose en zoomant sur un détail relatif à un groupe ou bien permettant d’influencer le point de vue de l’autre sur une question. Les médias le font très bien en montrant des évènements de très près et de manière fréquente, occultant complètement les statistiques qui permettraient d’avoir du recul sur certains sujets.
Fonctionne exclusivement en présence d’une audience, d’un public, d’une classe, d’une foule, etc. On use alors de vocabulaire qu’on sait trop éloigné des connaissances des personnes qui assistent à la discussion, on tourne en ridicule l’autre, on se sert de l’effet de groupe pour mettre la pression sur l’autre afin qu’il se discrédite lui-même, etc. Un exemple parfait est celui des plateaux télévisés quotidiennement notamment avec un public présent dans l’émission.
Souvent, on peut entendre que tous les avis se valent. Il est aussi possible d’observer des personnes chercher à concilier tout le monde en voulant faire croire que tout le monde a raison en même temps, seulement chacun en une certaine proportion et avec une partie de la vérité. On cherche alors à mettre tout le monde d’accord en accordant à chacun un bout de victoire dans l’argumentation.
Ce sophisme résulte en partie du juste milieu. Il s’agit dans ce faux équilibre de présenter divers points de vue sur des sujets variés comme si chacun avait une position équivalente en terme de connaissances et de crédibilité scientifique. Ainsi, il n’est pas rare de trouver dans les médias des personnes qui affirment que les vaccins sont néfastes et d’autres qui expliquent l’inverse, ce qui amène une confusion important dans l’esprit des profanes. Cela mène d’ailleurs à l’argument de la faillibilité scientifique puisque, ne connaissance pas tous les sujets, on en arrive vite à la conclusion que “en science, on entend tout et son contraire”. C’est en un sens faux, puisqu’il n’y a jamais parfaitement 50% d’avis dans un sens et 50% dans l’autre, et en partie vraie puisqu’on entend vraiment tout et son contraire, mais dans les médias. Pour voir l’importance des médias dans le temps de parole accordé aux différents points de vue, il est intéressant de regarder cette vidéo de Defakator.
Dans le même esprit que “tous les avis se valent”, on peut aussi partir du (faux) principe que chacun a raison dans sa subjectivité et que ça a une valeur dans l’objectivité du débat. Ainsi, si chaque personne a une réalité qui lui est propre et qu’on se doit de l’accepter, alors tout le monde a raison en même temps et le débat n’avance pas.
Ici, on bloque littéralement l’avancée du débat puisque l’on nie en bloc tout ce qui n’apporte pas une solution parfaite à la situation. On pousse les autres à croire qu’il est nécessaire de trouver la solution, et que jusque là on ne peut qu’avoir un statut quo.
Ce sophisme consiste à pointer ce que font les autres pour justifier notre propre comportement. Par exemple : “Maman – Tu as eu une mauvaise note ! Enfant – Mais les autres en ont eu une pire !”
Cette vidéo d’Hygiène Mentale l’expliquera très bien.
Le but ici est de jouer avec la complexité de la logique de manière générale. Le but est de convaincre en faisant croire que “c’est mathématique !” alors que ça ne l’est clairement pas. C’est aussi une stratégie pouvant permettre de faire croire à l’interlocuteur qu’au final, il pourrait bien être d’accord avec vous, faute de réussir à raisonner autrement.
On part du postulat qu’il n’y a qu’une explication à l’observation. C’est un sophisme par lequel on considère une condition suffisante comme une condition nécessaire. On traite alors une implication logique comme si elle était une équivalence logique. C’est en quelque sorte une confusion entre la possibilité et la nécessité. La possibilité implique que plusieurs causes peuvent avoir la même conséquence. Il faut pour cela s’assurer des interactions entre les causes pour la même conséquence. Pour que l’affirmation du conséquent soit valide, il faut que la cause et la conséquence soient non-seulement liées mais qu’il n’y ait également aucune autre possibilité envisageable. Par exemple : “Si on roule vite, on a un accident. Il a eu un accident. Donc il a roulé vite.” On se doute bien qu’il existe bien d’autres causes d’accident que la vitesse de la voiture, ce raisonnement est illogique mais paraît juste.
Le raisonnement circulaire est un cas particulier de la pétition de principe. A = B parce que B = A. Evident dans des phrases courtes, ce type d’argumentation devient bien plus difficile à percevoir quand le raisonnement s’allonge et place plusieurs éléments entre le départ et la conclusion identique au départ de l’argumentation.
Il s’agit ici de prétendre une relation de cause à effet là où, vraisemblablement, il n’y en a pas. La confusion entre corrélation et causalité est appelée effet cigogne. Par exemple : “Il existe une corrélation entre la vente de crèmes glacées et le nombre de noyades.” Ici, ce qu’il faudrait prendre en compte est plutôt la météo, la période estivale…
On a une certaine tendance à présumer la cause au vu de l’effet. Cependant, il n’y a pas qu’une seule cause possible. On peut se resservir de l’exemple de l’affirmation du conséquent : “Si on roule vite, alors on a un accident. Je ne roule pas vite, donc je n’aurai pas d’accident.” C’est ici un raisonnement illogique puisqu’on l’a vu, il ne suffit pas de rouler vite pour avoir un accident de voiture.
Ici, nous partons du principe qu’un évènement en a causé un autre sans prendre en compte un troisième évènement, ou une série d’évènement, plus probable. Exemple : “Si il a un problème mental c’est parce qu’il consomme trop de drogues.”
Croire que le premier évènement a causé le second sans la moindre preuve. Exemple : “Depuis que l’on a stoppé la publicité pour les cigarettes, on constate une diminution des nouveaux consommateurs de tabac.” Attention, c’est bien le fait de croire qui est ici problématique, c’est de preuves dont on a besoin pour écarter la piste du sophisme !
Il est intuitif chez nombre de gens que commettre une faute réparera une autre faute, ce qui n’est pas logique. Ainsi, beaucoup de gens pensent encore que quand un enfant fait une bêtise (dans son sens le plus flou bien entendu) alors il faut le battre pour qu’il ne recommence pas. L’image la plus claire pour moi est celle-ci : quelqu’un qui hurle sur son enfant pour lui demander d’arrêter de… hurler.
C’est peut-être un des plus utilisés dans les médias, notamment sur certaines chaînes d’information en continu comme CNews ou BFMTv. Il s’agit là de combiner plusieurs informations et d’en faire un amalgame sans réel sens. Ainsi, on entend parler d’islamo-gauchisme, qui est un amalgame entre le concept de gauche politique en France et d’Islam. Mais il y a des phrases comme : “Tous les migrants sont des violeurs et des tueurs.” Dite par Zemmour, cette phrase image bien l’amalgame, puisqu’il cherche à mettre dans l’esprit des gens que migrant = mal alors qu’un grand nombre de contre-exemples existent. La réalité est toujours plus complexe que des amalgames, surtout ceux de Zemmour. Un dernier pour la route : “Comme par hasard, les écolos utilisent le vert de l’Islam !” En plus de nous montrer son incapacité à la modération, il arrive à faire un sophisme par association en faisant un amalgame.
C’est une faute de logique consistant à confondre un jugement de fait avec un jugement normatif. Ce paralogisme passe donc du jugement “x fait y” au jugement “x doit faire y”. Exemple : “Si les femmes portent un voile, alors les femmes doivent porter un voile.” Cela s’apparente beaucoup à la double faute, “si les autres font x, bah moi aussi je fais x”. Cependant, dans la double faute il y a une notion de “ça m’arrange bien qu’ils le fassent comme ça je peux le faire aussi”, alors que dans ce paralogisme on occulte cette notion de bénéfice personnel.
Conclure qu’un résultat est dû au hasard alors que les preuves suggèrent fortement le contraire. La variation de l’appel à la chance utilise la chance à la place de la coïncidence ou du hasard.
Les coïncidences existent. Lorsque les preuves vont dans le sens d’une coïncidence, la coïncidence peut être la meilleure option.
Qui oserait dire à quelqu’un qui pleure que son émotion n’a rien à faire dans un débat argumenté ? Passer pour le méchant en ne prenant pas en compte l’émotion de l’autre dans le raisonnement logique n’a rien de confortable, et souvent lorsque les émotions interviennent la discussion perd tout intérêt et il ne reste plus que de la rhétorique pour se sortir de là sans paraître insensible.
C’est l’appel du bâton. Il s’agit de faire appel à la force, ou menace de faire appel à celle-ci, afin de forcer l’acceptation de sa conclusion. Cela peut facilement basculer dans l’argument par la conséquence ou encore l’appel à la terreur. Par exemple : “Si tu continues de me contredire, tu vas vraiment t’en prendre une.” Mais cela peut aussi être : “Tu ferais mieux de me croire, parce que si tu fais comme tu l’as dis, tu vas te retrouver en très mauvaise posture.”
Soutenir qu’une chose est fausse puisque cela implique des choses que l’on ne souhaite pas être vraies. Exemple : “Si c’est vrai qu’il a menti ce jour là, alors ça veut dire que nous n’aurions toujours pas attrapé le coupable, et ça, c’est peu probable puisque la personne que l’on a attrapé a avoué.” Les aveux peuvent être obtenus de bien des manières, et une personne innocente peut avouer bien des choses quand on la malmène pendant un certain temps et d’une certaine manière.
Renforcer la peur de l’autre et jouer sur ses préjugés sociaux et tribaux afin de le manipuler. Un exemple de type pente savonneuse : “Si on ne régule pas correctement l’immigration, et par là j’entends fermer les frontières tout d’abord, alors c’est une invasion barbare qui nous attend !”
Complimenter et flatter l’autre afin de le rendre plus malléable et plus disposé à être d’accord. Il est difficile d’accepter un compliment et de devoir se confronter immédiatement après.
Puisque ce qui est “naturel” met plus en confiance, nous nous servons d’arguments mettant en avant le “vert” ou tout ce qui rappelle la nature afin d’appuyer notre argumentaire.
Partir du principe que si ça vient d’une contrée lointaine, c’est forcément mieux. Exemple : “Quand on voit comment ils vivent là-bas, on ne peut que voir la sagesse de leur culture.”
Plus c’est ancien, mieux c’est/ plus vrai c’est. Exemple : “On a toujours fait comme ça et ça marche très bien. Les nouvelles manières de faire n’ont rien à nous apprendre.”
Plus c’est récent, mieux c’est. Exemple : “Tu as vu le dernier iPhone ? Il est sûrement encore mieux que celui d’avant !” En plus de ne pas savoir si c’est réellement mieux à moins de bien connaitre le sujet de telles technologies, il est peu vraisemblable que ce mieux soit d’une absolue nécessité.
Susciter tout simplement la pitié de l’autre en se servant d’images ou de paroles menant l’autre à culpabiliser s’il ne va pas dans notre sens. Il est d’ailleurs difficile de ne pas donner de monnaie à un enfant mendiant, puisque notre pitié nous pousse à vouloir “réparer” une telle injustice.
Ridiculiser les propos de l’adversaire, ce qui se rapproche de l’homme de paille et du chiffon rouge. Si nous commençons à ridiculiser l’adversaire en tant que tel directement, nous rentrons dans la catégorie des attaques personnelles.
Provoquer la colère de l’adversaire permet de diminuer sa capacité de raisonnement. Faire appel à son amygdale pour contrer son cortex frontal, d’une certaine manière. On peut faire cela en affirmant des choses dont on sait qu’il est en profond désaccord, de manière presque viscérale, mais aussi en usant d’attaques personnelles ce qui nous placerait donc dans la première catégorie de sophismes vus.
Dans la même idée que le stratagème précédent, il s’agit là de mettre le doigt sur l’argument qui énerve l’adversaire, ce qui semble indiquer l’endroit faible de son argumentaire.
Rejeter un argument en se basant sur ses propres préjugés. Cela peut prendre la forme d’un autre sophisme, l’attaque personnelle. Exemple : “Je ne vois pas pourquoi j’écouterai un riche me parler du RSA.” Sous-entendu que le riche ne peut comprendre une situation de précarité et donc donner des conseils, voire militer en la faveur du revenu universel.
Dire que quelque chose est vrai ou faux parce qu’on voudrait réellement que ce soit le cas, au point de nous voiler la face. Exemple : “Si il avait fait cela, il me l’aurait dit, c’est certain, je le connais bien.”
L’argument contient des informations qu’il semble impossible d’avoir obtenues, comme si elles provenaient d’un auteur omniscient. Ce type d’écriture/récit est caractéristique de la fiction, aussi, lorsqu’il est utilisé dans un argument, il devrait jeter le doute.
Exemple : “Le prophète dit forcément la vérité, il ne peut pas mentir.” Il est important de comprendre ici que c’est complètement invérifiable et qu’il est impossible d’affirmer de quelqu’un qu’il ne peut pas mentir, d’autant plus quand cette personne a vécu il y a des siècles en arrière.
En ajoutant simplement un “je crois” aux arguments et affirmations non factuels, vous pouvez éviter de nombreux sophismes et être plus honnête tout en faisant preuve de plus d’humilité.
L’attribution de caractéristiques et de buts humains à des objets inanimés, des animaux, des plantes ou d’autres phénomènes naturels, ou à des dieux. Cela devient un sophisme logique lorsqu’il est utilisé dans le contexte d’un argument.
Exemple : “Tu manges du bœuf ? Tu es un cannibale !” Cet exemple n’est pas inventé, malheureusement.